Le caméléon Serbe

07/11/2022

Il est difficile de faire un bilan global aprés notre sejour d'une semaine en Serbie. Tel un caméléon, elle nous est apparue à la fois changeante, pleine de contrastes, parée de mille couleurs, voire parfois exubérante. Entre des campagnes aux traditions marquées et des villes modernes et décomplexées, c'est finalement le sentiment d'un pays à deux vitesses qui reste après notre séjour. Un pays à la fois attaché à son riche patrimoine mais aussi en pleine mutation, avec de fortes ambitions pour se faire une place au sein de la Communauté Européenne.


LE PARC NATIONAL DE TARA

A notre arrivée le 16 octobre, nous sommes accueillis par un grand soleil et 27 degrés : quel plaisir de pouvoir se promener en short en plein automne ! Une autre surprise nous attend en traversant la frontière : nous perdons notre alphabet latin bien connu et découvrons des panneaux routiers en alphabet cyrillique. Un nouveau challenge qui vient brouiller un peu plus nos repères déjà bien amoindris depuis notre départ de France. Notre première destination est le Parc National de Tara, à la frontière avec la Bosnie. Nous retrouvons un superbe paysage montagneux et un mode de vie rural, bien que nous sentions le niveau de vie plus développé qu'en Bosnie. Nous croisons de jolies habitations traditionnelles en bois, mais aussi des petites fermettes et leurs « meules » de foin caractéristiques des balkans (Elles ressemblent à des bonhommes barbus ou de grosses poires, vous ne trouvez pas ?). Nous faisons halte dans la ville de Bajina Bašta pour admirer la petite cabane de pécheur, perchée sur un rocher au milieu de la rivière Drina. A peine le pied posé, nous sympathisons avec une première famille de Belgrade. Les petites filles jouent avec Cassia pendant que leur père nous explique qu'il rêve d'acquérir un Hymer vintage comme le nôtre et nous montre des photos des annonces qu'il a repérées. Il nous fait également part d'une anecdote méconnue. Les voisins Roumains se seraient « appropriés » le mythe de Dracula pour développer le tourisme, mais le premier vampire serait originaire d'un village Serbe se trouvant à quelques kilomètres. Le mot « vampire » lui-même serait d'ailleurs Serbe, ce qui semble être une petite fierté nationale.

Nous passons la nuit en haut de la montagne dans la petite station de Mitrovac, et partons dès le matin pour une randonnée jusqu'au point de vue de Banjska Stena. Dans la forêt, nous contemplons les couleurs d'automne et les feuilles qui tombent lentement au sol, venant fournir le tapis déjà bien épais sous nos pieds. Le panorama final est grandiose : nous sommes perchés en haut des falaises et dominons la rivière Drina, frontière naturelle avec la Bosnie qui se tient face à nous. Le lendemain, nous partons à la découverte du lac artificiel formé via un barrage avec notre kayak. Curieux, nous profitons d'être seuls sur l'eau pour nous rapprocher des jolis petits chalets en bois flottants disposés tout au long de la falaise. Nous croyons rêver lorsque nous voyons une maison se déplacer au milieu du lac : nous comprenons alors que certaines sont en fait des « maisons-bateaux » : encore mieux que le mobil-home ! Alors que nous sommes absorbés par notre visite, nous entendons un bruit de moteur qui se rapproche et nous retrouvons nez à nez avec la gendarmerie en zodiac. Ils nous adressent quelques mots en Serbe auxquels nous répondons un peu au hasard « tourists, just watching ». Cela semble les contenter puisqu'ils repartent aussitôt : ouf, nous n'aurions pas aimé nous faire arrêter pour une cause inconnue ! Nous finissons notre découverte de la rive Serbe, et après avoir vérifié que les gendarmes étaient désormais loin, nous traversons « illégalement » la frontière au milieu du lac pour explorer la rive du côté bosnien. Ici, les habitations sont plus sommaires et pas toutes terminées, mais la vue sur les falaises est encore plus impressionnante !


NOVI SAD

Après ces 3 jours dans la nature, il est temps de partir découvrir la vie citadine avec la visite de Novi Sad, la deuxième ville du pays, décrite comme une ville culturelle et en plein essor. Nous trouvons un emplacement calme près de cités étudiantes et à 15 minutes du centre-ville en vélo : parfait pour pouvoir profiter ! Cette ville se révèle vivante et moderne - de loin la plus moderne que l'on ait vue depuis un bon moment. Ses couleurs pastel et son mélange architectural austro-hongrois et serbe nous séduisent immédiatement : des touches de vert, bleu ou rose amènent une atmosphère douce et joyeuse malgré l'automne qui s'installe. Nous sentons tout de suite le potentiel festif de la ville, déjà bien animée en plein jour avec ses nombreux cafés et terrasses pleins à craquer. Nous repérons une rue pleine de bars et clubs et décidons de nous y rendre le soir venu. En attendant, nous poursuivons notre exploration et faisons une halte dans le curieux café « Trcika », niché dans une vieille rame de tramway très chaleureuse. Enfin, nous reprenons nos vélos pour traverser l'imposant pont sur le Danube et visiter la fameuse forteresse de Novi Sad. Les lieux nous paraissent un peu déserts et tristes à cette période de l'année, nous avions imaginé trouver une autre ambiance à cet endroit qui accueille l'un des plus gros festivals électro d'Europe au mois de juillet : l'EXIT festival.

Au retour de notre visite, nous sommes abordés par un monsieur qui promène son chien près de Mammouth et passons un long moment à discuter avec lui : nous parlons de chiens (évidemment), de sa famille, des lieux à visiter dans la ville... Il confirme ce que nous avons vu un peu plus tôt : d'importants travaux sont en cours dans la ville, conséquence des ambitions du pays de s'ouvrir au tourisme et de mener des transformations pour rejoindre l'Union européenne. Alors que nous lui expliquons que nous souhaitons sortir profiter de la ville cette nuit, il nous indique gentiment un endroit pour laisser le camping-car. Près de sa résidence, à la lumière de lampadaires et sous une caméra de sécurité : ici, Mammouth sera en sécurité. Nous sommes donc prêts pour la découverte de Novi Sad « by night » et nous rendons dans notre fameuse rue, déjà bien plus animée qu'en journée. Nos premières impressions de la jeunesse Serbe se confirment le soir venu : il semble régner ici un véritable culte de l'apparence. Les jeunes femmes en particulier sont sur leur 31 avec un mot d'ordre qui semble être : cheveux longs et lisses, maquillage à outrance, faux-cils, ongles gel et robes pour se mettre en valeur. Autant dire que nous faisons un peu tâche avec nos baskets, jeans et sacs de randonnée ! Après un premier pub, qui n'avait de pub que le nom, nous tombons par hasard sur un DJ set gratuit dans la cour intérieure d'un club. Le lieu est plein à craquer et réchauffé par des radiateurs au gaz qui permettent de profiter de l'extérieur malgré la fraîcheur de la nuit. Un serveur vient immédiatement prendre notre commande et nous admirons l'efficacité serbe : en France, il nous aurait fallu nous battre au bar pour avoir un verre. Alors qu'il revient avec nos verres de Gin et Whisky, nous sortons de quoi régler notre commande, mais le voilà qui fait immédiatement demi-tour et disparaît dans la foule. Nous restons un peu perplexes : Il y a-t-il un verre gratuit à l'arrivée ? Est-ce une soirée open-bar ? Ou est-ce juste un oubli du serveur ? Dans tous les cas, cet accueil serbe nous paraît immédiatement très sympa avec ce principe de verres gratuits donc nous décidons de rester pour la soirée ! (Malheureusement, nous aurons à payer notre deuxième tournée !).

Le lendemain, l'heure est à l'hésitation : nous avions initialement prévu de poursuivre notre route vers le nord afin de rejoindre la frontière roumaine. Finalement, sur les conseils d'Alexandra (de la famille d'Isaline) qui connaît bien le pays, nous modifions notre trajet pour rester quelques jours de plus en Serbie. Nous suivons le Danube vers l'Est, afin de nous rendre dans le parc national de Djerdap qui se révélera le clou du spectacle de notre séjour dans le pays ! Donc encore merci à toi Alex pour ce précieux conseil 😉


LE PARC NATIONAL DE DJERDAP

Ici, l'immense Danube s'étend à perte de vue, bordé par un canyon, s'étirant sur plus de 100 kilomètres et dont les gorges atteignent 300 mètres à leur point le plus haut ! Les couleurs de l'automne sont à leur apogée avec un orange flamboyant et rendent le tableau encore plus beau. A notre arrivée dans le parc, nous commençons par admirer la forteresse de Golubac située à l'entrée du canyon. Puis nous poursuivons notre route vers les fameuses « Portes de fer », lieu où les gorges se rétrécissent et sont les plus impressionnantes. Le nom viendrait du temps où ce lieu marquait la frontière entre les empires austro-hongrois et ottoman : une énorme chaîne en fer bloquait le trafic sur le fleuve pour la perception des taxes douanières. Et comme tout est plus beau vu de haut, nous décidons de partir à l'assaut des plus beaux points de vue sur le canyon, avec au programme une journée bien sportive. Mais le panorama en valait la peine : nous pouvons contempler en face les belles collines de la Roumanie et l'impressionnante sculpture du Roi Décébale, gravée à même la montagne sur 40 mètres de haut. Un paysage plein de promesses pour la suite de notre voyage vers l'Est.